| L’intrépide et courageuse prisonnière politique, femme Togolaise, sage femme d’Etat, femme politique et gréviste de la faim |

Sage-femme, militante de parti, Grace Bikonibiyaté KOUMAYI représente un grave symbole de la violence faite aux femmes militantes au Togo.
Arrêtée une première fois le 6 juin 2025 à l’occasion de la manifestation appelée sur les réseaux sociaux par les jeunes bloggeurs qui ont créé par la suite le M66 (Mouvement du 6 juin), elle est détenue pendant plusieurs jours au cours desquels elle a été affreusement torturée et violée par deux agents de sécurité puis hospitalisée dans des conditions indignes,
Quatre mois plus tard, le vendredi 3 octobre 2025, elle est à nouveau arrêtée pour ses activités civiques à son domicile en début d’après-midi, au quartier Agoè-Nyivé et devant ses deux enfants qui rentraient de l’école alors qu’elle revenait d’une réunion au siège du Collectif des associations contre l’impunité au Togo (CACIT)).
Enlevée et conduite au Service central de recherches et d’investigations criminelles (SCRIC), elle y est détenue pendant 3 jours au cours desquels elle a été victime de violences sexuelles, elle est ensuite présentée, le lundi 6 octobre, au Doyen des juges d’instruction du Tribunal de Lomé qui l’a inculpée de « troubles aggravés à l’ordre public, apologie de crimes et délits, appel à la révolte et complot contre la sûreté intérieure de l’Etat » avant de la placer sous mandat de dépôt à la Prison civile de Lomé.
Son seul « crime » est d’avoir filmé et diffusé sur les réseaux sociaux des images et messages sur la misère que vivent les populations togolaises notamment à Pya, Hahotoé, Kpomé, Atakpamé, Lomé, etc.
C’est contre toute cette situation, ses arrestations arbitraires, les violences et le viol qui ont été exercés sur sa personne qu’elle a décidé de lancer, avec GOMA Abdel Aziz une grève de la faim depuis le 8 novembre, son état étant jugé extrêmement préoccupant au 13e jour de cette action de protestation.
C’est dans cette situation que, le vendredi 21 novembre, par la voix de dame Mazalo AGBA, Chef d’escadron de la gendarmerie togolaise a cru devoir porter une grave accusation de mensonge par un communiqué de son corps lu au journal télévisé de 20H déclarant que Grâce Bikonibiyate KOUMAYI, engagée dans la grève de la faim contre le sort qui lui est fait à la Prison civile de Lomé depuis le 8 novembre.
Voici en substance, ce que dit ce communiqué :
« La Gendarmerie nationale informe l’opinion de l’interpellation, le 3 octobre 2025, de la nommée KOUMAYI Bikonibiyate Grace, auteure présumée de contenus audiovisuels manifestement attentatoires à la sécurité intérieure de l’Etat.
Ces contenus, diffusés à travers les réseaux sociaux, appelaient à la haine et à la commission de crimes et de délits contre les hautes personnalités étatiques.
Pendant que cette affaire est en cours d’instruction devant les instances judiciaires compétentes, des allégations faisant état de viol, de traitements cruels, inhumains et dégradants, qu’elle aurait subis lors d’une précédente interpellation, le 6 juin 2025, suite à sa participation à une manifestation illégale sont entretenues sont à travers divers canaux.
Il y a lieu de rappeler que, malgré les charges retenues contre elle, l’intéressée avait été remise en liberté dès sa présentation au parquet le 10 juin 2025, en même temps que d’autres personnes, après un rappel à la loi.
En dépit de ce rappel à la loi, elle a poursuivi des activités subversives véhiculées sur les réseaux sociaux et en organisant des réunions publiques non autorisées.
Aussi est-il nécessaire d’indiquer qu’au cours de sa garde à vue au groupement de gendarmerie de Lomé, dame KOUMAYI, tout comme les 31 autres personnes gardées à vue dont 9 femmes, a reçu la visite d’une délégation de la Commission nationale des droits de l’Homme qui s’était déclarée satisfaite de leurs conditions de détention.
Depuis lors, jusqu’à son inculpation par le magistrat instructeur, en passant par sa présentation au parquet et, ce, en présence de ses avocats, elle n’avait fait cas d’aucune agression sexuelle ni d’aucun autre traitement cruel, inhumain et dégradant.
La Gendarmerie nationale réaffirme son engagement à respecter les droits humains et les procédures légales.
Elle appelle la population à la vigilance face aux manipulations sur les réseaux sociaux et assure que toute allégation fera l’objet de vérification et mesures appropriées.
Le Togo demeure un état de droit pour les autorités judiciaires pour suivre le traitement de ce dossier avec sérénité. »
Dès le lundi 24 novembre, depuis sa cellule de la Prison civile de Lomé, Grace Bikonibiyaté KOUMAYI a contredit ces déclarations mensongères par une réponse écrite qu’elle fait diffuser dans l’opinion publique pour rétablir la vérité sur les faits comme suit :
« Prison civile de Lome, le 22/11/25
KOUMAYI BIKONIBIYATE Grace
Sage-femme engagée, femme politique.
Je témoigne, et je me tiens debout pour la vérité.
Je prends aujourd’hui la parole depuis la prison civile de Lomé pour éclairer le TOGO et le monde entier sur les événements que je déclare avoir vécu et sur la profonde crise morale que traverse notre nation. Si je parle, c’est parce que le silence serait une trahison envers moi-même, envers les femmes et envers ce pays que aimons.
Le 06 Juin 2025, dans le cadre des manifestations pacifiques pour réclamer un Togo juste, vivable et vivant pour tous, j’ai été arrêtée de manière brutale en pleine ville de Lomé. Conduite dans un lieu de détention (Brigade de Recherche et d’Investigation), j’ai été selon mes déclarations, victime de violences, de torture et de viol. Ce jour-là, lorsque la délégation de la CNDH est arrivée, accompagnée des responsables du lieu de détention, je leurs ai signalé mes douleurs notamment au niveau du vagin. Cela n’a suscité aucun secours, aucune humanité.
Malgré les menaces quelque semaines après ma libération, j’ai décidé de témoigner publiquement. Mes vidéos étaient celles d’une femme blessée dans sa chair mais déterminée à faire entendre la vérité.
Puis le 03 Octobre 2025, des agents du SCRIC armés, sont venus m’arrêter devant mon domicile. Ce jour même mon enfant de 03 ans, qui ne voulait qu’embrasser sa mère, a été brutalisé par le chef de bord nommé Sidi Assoh.
Durant les 03, 04, 05, et 06 Octobre, j’ai été détenue dans les conditions que je décris comme violentes et inhumaines avant d’être déférée et placée sous mandat de dépôt.
Depuis ma cellule, j’ai découvert avec stupeur télévision Togolaise (TVT) au journal à la une, un communiqué officiel affirmant que je n’ai subi ni torture, ni viol.
Je Veux dire clairement : je maintiens l’intégralité de mes déclaration.
Aux autorités qui souhaitent des preuves: je suis ici à la prison civile de Lomé. Que ceux, qui veulent voir mes blessures, viennent.
A la chef d’escadron Mazalo AGBA, qui a porté ce message de dénégation, je pose une simple question : « comment une femme peut-elle trouver le courage de nier la douleur d’une autre femme? » Où place-t-on son âme lorsqu’on tourne le regard devant la souffrance humaine ?
J’appelle la CNDH à se tenir cette pleinement cette fois-ci dans son mandat, sans calcul, sans crainte, sans compromis. Le rôle d’une institution nationale de droits humains n’est pas de protéger le confort des puissants mais défendre la vérité même lorsque celle-ci dérange.
J’en appelle également aux organisations nationales et internationales des droits humains: que la lumière soit faite, que la vérité, toute la vérité soit dite. Alors, je sollicite votre attention immédiate et votre vigilance. Je demande formellement :
1) L’ouverture d’une enquête indépendante, impartiale et exhaustive sur les violences que je déclare avoir subi ;
2) La garantie de ma sécurité physique, juridique et psychologique dans ma situation actuelle en prison et dans mon 16e jour de grève de la faim ;
3) La protection de ma famille, en particulier de mes enfants mineurs ;
4) Le suivi rigoureux des institutions togolaises afin qu’elles exercent leur mandat conformément aux normes internationales.
À mon peuple : je ne renonce pas.
Togolaises, Togolais, j’ai vécu selon mes déclarations, des choses qui auraient pu briser n’importe quel être humain, mais je tiens debout, je me tiens droite, je me tiens vivante.
Je fais cette déclaration non par esprit de confrontation, mais par nécessité vitale, par exigence de vérité et par sens du devoir citoyen.
Je suis sage femme d’Etat : j’ai juré de protéger la vie.
Je suis une femme politique: j’ai choisi de défendre la dignité.
Je suis Togolaise : je crois en un avenir où les institutions serviront réellement les citoyens. Je continue de croire qu’une lumière internationale peut dissuader les abus, révéler la vérité et protéger les victimes.
Je vous rassure que je me tiens debout, je me tiens droite, je me tiens vivante. Parce que je suis en mission, pas une mission politique : une mission spirituelle, citoyenne humaine. Ah oui, la mission d’éveiller les consciences, de briser les silences, de rappeler que la dignité n’est pas négociable.
Je le dis avec conviction, on peut priver un corps de liberté, mais on ne peut pas arrêter une âme veillée.
Le TOGO de demain, pas sans nous. Togolais viens bâtissons la cité.
Grace Bikonibiyaté KOUMAYI »
– Il y a d’abord lieu de s’étonner que c’est par la voie d’une femme, officier de gendarmerie, que ce corps a décidé de répondre à Grace Bikonibiyaté KOUMAYI, ce qui ajoute encore un plus grand mépris aux femmes togolaises qui se voient ainsi chosifiées par les hommes en place au sommet de l’Etat dictatorial qui sévit actuellement au Togo en dépit de toutes les proclamations antérieures sur leur volonté de promouvoir le droit des femmes. Quelle infamie !
Il y a ensuite lieu de constater la constance dans le recours au mensonge par cette institution qu’est la gendarmerie comme méthode pour embastiller et maintenir dans l’enfermement des citoyens innocents aux fins de couvrir par des actes délictueux, répréhensibles, coupables devant la loi, la préservation du régime dictatorial en éliminant tous ceux qui ont des velléités d’expression de positions divergentes.
Comme cela a notamment été le cas dans la dernière période de ces deux ténébreuses affaires dont nous vivons les conséquences jusqu’aujourd’hui :
* l’incendie criminel des grands marchés de Lomé et de Kara, début janvier 2013 :
Provocation délibérément orchestrée par les plus hautes autorités togolaises pour en faire porter le chapeau aux responsables de l’opposition togolaise qu’elles cherchaient ainsi à décapiter, comme de nombreuses révélations ont fini par le démasquer, notamment le rapport du CST et les révélations de Mohamed LOUM, l’exécution finale de cette machination a été confiée aux bons soins de la Gendarmerie togolaise. Car, c’est bien elle qui a procédé à des interrogatoires rocambolesques, des arrestations et la torture d’innocents citoyens dont l’un, Etienne YAKANOU, est mort en détention sous les coups qui lui ont été violemment administrés par un officier de gendarmerie depuis lors bien connu.
* l’Affaire « Tigre Révolution » :
Cette autre machination a été fomentée par la dictature togolaise en 1998 en ayant recours à un agent provocateur vivant en Allemagne en utilisant les forces de sécurité pour piéger d’innocents citoyens afin de les arrêter et les faire emprisonner arbitrairement. Cela, tout juste pour casser et faire refluer le soulèvement populaire du peuple togolais lancé en 2017 par le PNP de TIKPI Atchadam avec le soutien des organisations démocratiques togolaises avec lesquelles a été constituée la coalition C14. La plus de centaine de détenus, qui sont les plus nombreux parmi les innocents prisonniers politiques qui croupissent actuellement dans les geôles de la dictature togolaise et parmi les grévistes de la faim, en constituent la plus vivante réalité. Et, c’est bien à la Gendarmerie nationale que, début décembre 201, qu’a été orchestré devant la presse nationale et internationale un grossier montage par lequel on a tenté de forcer les innocents arrêtés à cette occasion à collaborer en faisant des déclarations mensongères par lesquelles il leur était demandé de s’auto-accuser en se présentant comme des membres du fantomatique groupe « Tigre Revolution ». Ce que tous ont refusé et nié devant les journalistes présents, au grand dam des officiers tortionnaires de la Gendarmerie, tous honteux, comme on peut le voir sur la vidéo postée par l’un d’entre eux sur son compte YouTube. Par la suite, c’est à des menaces de mort et d’emprisonnement à vie auxquels ceux qui ont eu le courage de dénoncer cette machination ont eu droit le lendemain matin pour avoir refusé de cautionner ce montage. Et, comment oublier que c’est bien à la Direction de la Gendarmerie nationale, en face de la BOAD et de la BIDC que nombre des innocents illégalement arrêtés à cette occasion ont été longuement détenus dans les plus inhumaines conditions.
Le rôle de la Gendarmerie comme héritage du passé colonial français :
Il y a enfin lieu de revenir sur ce rôle d’héritière du passé colonial français que la Gendarmerie togolaise a joué et continue de jouer avec cette terrible conséquence que le peuple togolais vit jusqu’aujourd’hui et dont il lui est absolument nécessaire d’envisager sérieusement de se débarrasser pour préserver la démocratie, l’Etat de droit, la défense des intérêts nationaux au Togo.
Comment peut-on oublier en effet que c’est bien le corps de la Gendarmerie nationale qui s’est trouvé au cœur du complot qui a abouti à l’assassinat de Sylvanus OLYMPIO, le père de l’indépendance et de la nation togolaise, le premier président démocratiquement élu du Togo, aux aurores du 13 janvier 1963 ? Un assassinat planifié et méthodiquement mis en exécution sur les ordres du Général De GAULLE par le Commandant de Gendarmerie Georges MAITRIER, bien que membre du cabinet militaire de Sylvanus OLYMPIO qui venait d’ailleurs de le promouvoir au grade de commandant quelques temps à peine auparavant.
Et, comment peut-on oublier enfin que la gendarmerie togolaise continue toujours à être un instrument au service de l’impérialisme français dont elle reçoit continuellement encadrement, formation et soutien de la part de ses maîtres français qui lui envoient ces « coopérants » militaires, car la gendarmerie est bien d’abord un corps militaire, pour continuer à lui enseigner les plus viles méthodes d’oppression du peuple togolais.
Comment peut-on oublier à cet égard son rôle dans la répression sauvage et sanglante des marches pacifiques depuis les années 1990 avec leurs cortèges d’arrestations arbitraires, d’assassinat de pauvres citoyens innocents notamment des jeunes, comme tout dernièrement les plus de 7 jeunes manifestants morts noyés dans les lacs de Lomé à l’occasion des marches pacifiques initiées par la jeunesse togolaise depuis le 6 juin 2025 ?
C’est pour toutes les raisons de ce passé et de ce présent que notre sœur Grace Bikonibiyaté KOUMAYI vit douloureusement présentement dans sa chair, son corps et son âme, dans l’enfer de la Prison civile de Lomé que le peuple togolais doit sérieusement songer à tourner ces pages sombres de la Gendarmerie togolaise comme héritage du passé colonial français. Pour s’atteler sérieusement ensuite à la constitution d’une force de sécurité respectueuse des droits des citoyens et assurant leur sécurité dans la sérénité.
En attendant, nous ne pouvons que rendre un vibrant hommage et saluer l’étonnant courage et la bravoure de notre sœur Grace Bikonibiyaté KOUMAYI, en invitant toutes les femmes togolaises à s’en inspirer pour œuvrer à la très proche libération du peuple togolais du joug de la dictature du clan des EYADEMA-GNASSINGBE !
