SYLVANUS FOREVER !

15 septembre – 15 octobre 2025 :
Mois des martyrs et prisonniers politiques du Togo
L’inoubliable martyr, enfant chéri du peuple togolais,
lâchement assassiné en juillet 1992

29 ans, 6 mois, 10 jours après l’assassinat de Sylvanus OLYMPIO lors du putsch du 13 janvier 1963 au Togo, survient l’attentat sur l’inoubliable martyr Tavio Ayawo Tobias AMORIN qui, d’abord hospitalisé à Lomé, décède après 3 jours de souffrances au lendemain de son évacuation à l’Hôpital St Antoine de Paris.

En ce mois fatidique de juillet 1992, Tavio Ayawo Tobias AMORIN est le Premier secrétaire du Parti socialiste panafricain (PSP), membre fondateur du Mouvement patriotique du 5 octobre (MO5), Secrétaire général du COD II, membre du Haut conseil de la République (HCR), organe transitoire issu de la Conférence nationale souveraine de juillet – août 1991 dont il est le président de la Commission politique et des droits de l’Homme ainsi que de la Commission spéciale chargée d’élaborer le nouveau projet de Constitution.

Vivant symbole pour cette jeunesse révolutionnaire qui s’est insurgée au Togo le 5 octobre 1990, celle-ci et les suivantes qui ont renouvelé ces tentatives n’ont cessé de se retrouver jusqu’à ce jour en lui pour son franc parler, son audace, son courage, son esprit de sacrifice et son impétueuse volonté de rompre radicalement avec l’ordre ancien. Mais, également adulé par les générations plus âgées, celles-ci lui vouent un grand respect pour son savoir et son honnêteté depuis la Conférence nationale souveraine à l’occasion de laquelle elles l’ont découvert ces mois de juillet-août 1991.

Un an plus tard, après les multiples soubresauts de la tumultueuse crise sociopolitique d’alors, il participe, le 22 du mois de juillet 1992, à une émission sur Radio Lomé, la radio nationale togolaise au cours de laquelle, avec un autre membre du HCR, ils ont la charge de présenter à la population, le nouveau projet de Constitution dont cet organe législatif transitoire vient d’achever l’élaboration.

Au cours de cette émission, il marque fermement son opposition à toute idée que ce nouveau projet de Loi fondamentale soit modifié pour permettre à EYADEMA d’être à nouveau candidat à toute élection présidentielle à venir, comme la loi portant Statut des Forces armées togolaises et les décisions de la Conférence nationale souveraine l’interdisent d’ailleurs déjà.

Le 23 juillet 1992, lendemain de cette émission, il est victime d’un attentat : vers 21 heures, au quartier de Tokoin Gbonvié, à Lomé, il est traqué et poursuivi par un groupe d’individus dont l’un vide le chargeur d’un pistolet mitrailleur sur lui alors qu’il sort du domicile d’une parente où il séjourne temporairement pour rendre visite à une connaissance dans le quartier.

Selon le communiqué publié le 24 juillet par le gouvernement, les agresseurs ont abandonné sur les lieux de l’attentat « une carte professionnelle au nom de KAREWE Kossi, né en 1967 à Pya, préfecture de la Kozah, gardien de la paix en service à l’Ecole de Police en qualité de moniteur de sport, un pistolet mitrailleur de calibre 9mm, un revolver Smith and Wesson 357 magnum, trois chargeurs de P.M., un chargeur de pistolet mitrailleur, des munitions, deux grenades, deux bouchons allumeurs et une paire de menottes ».

Dans une requête adressée à la Ligue togolaise des droits de l’Homme le 14 août 1992, sa famille indique : « la présence d’une troisième personne sur les lieux de l’attentat n’est pas à exclure selon une conversation avec le Premier Ministre ».

Le 25 juillet, il est évacué dans un état critique sur l’Hôpital St Antoine de Paris pour y recevoir des soins intensifs.

Lors de son transfert de l’Hôpital de Tokoin à l’Aéroport International de Lomé-Tokoin où attend l’avion spécial devant l’évacuer sur Paris, l’ambulance le transportant tombe en panne. Il est alors transféré dans une autre ambulance faisant partie du cortège.

A son arrivée à Paris, on constate qu’il porte au front, du côté droit, une blessure résultant vraisemblablement d’une arme blanche de l’avis de certains médecins.

Or, tous ceux qui ont vu Tavio AMORIN après l’attentat affirment qu’il n’avait pas cette blessure lors de son admission et tout au long de son séjour à l’Hôpital de Lomé-Tokoin ainsi qu’à son départ pour l’aéroport où il embarque pour son évacuation sanitaire sur Paris.

Il succombe des suites de ses blessures à l’Hôpital St Antoine de Paris, le 26 juillet, lendemain de son admission mais son décès n’est annoncé que le 29 juillet 1992.

Car, le lundi 27 juillet 1992, est décidée en toute hâte puis officiellement annoncée l’ouverture de négociations politiques dites de la « Commission mixte paritaire » associant, sous l’égide des représentants de la CEE au Togo, les représentants du régime RPT et ceux des 8 principaux partis de l’opposition démocratique d’alors dits du « groupe des huit » : CAR, UTD, CDPA, PAD, PDR, PDU, PRI, UTR. Elles ont essentiellement pour objet de « donner » à EYADEMA ce qu’il cherchait en faisant assassiner Tavio : faire sauter les dispositions du nouveau projet de constitution élaboré par le HCR qui lui interdisent d’être candidat aux consultations électorales ultérieures. Dispositions auxquelles Tavio AMORIN s’est opposé avec vigueur le 22 juillet 1992

Le mardi 28 juillet 1992, tout aussi précipitamment est annoncé, au lendemain même de l’ouverture de ces négociations, la signature des « Accords de la Commission mixte paritaire » entre le régime RPT et les partis du « groupe des huit » de l’opposition togolaise. Présenté par les responsables de ces partis comme « le prix à payer pour avoir la sécurité au Togo », cet accord légalise l’illégalité et l’impunité dans le contexte d’alors.

Mais rien ni personne ne peut cacher cette intangible vérité : cet « Accord » est une réelle trahison de la mémoire de Tavio AMORIN, vénérable symbole de la jeunesse et du peuple togolais, par les inadmissibles concessions qu’il fait à EYADEMA sur des points que Tavio considérait comme intouchables!

C’est ainsi qu’analysant la lourde responsabilité assumée devant l’histoire par les dirigeants des partis de l’opposition togolaise d’alors signataires de cet accord, l’hebdomadaire Jeune Afrique Economie (n° 159 de septembre 1992) a indiqué :

« L’Histoire retiendra que, autour de la table des négociations, en face de la « délégation présidentielle », il y avait Edem Kodjo, Yao Agboyibo, Jean Savi de Tové, Francis Ekon, Goyo Grunitzky, Bawa Mankoubi, Zarifou Ayéva et Léopold Gnininvi. Sur l’autel de la compromission, les opposants ont cédé bien des choses au général Eyadéma. »

Relevons, 33 ans après cette trahison de la mémoire de Tavio, que les mêmes acteurs politiques ont continué à poursuivre la même trahison des intérêts et aspirations les plus profonds du peuple togolais.

C’est ce qu’on peut notamment constater aujourd’hui à travers le rôle joué et les fonctions occupées par Jean-Lucien SAVI DE TOVE, chef de la délégation des partis de l’« opposition » aux fameuses négociations d’alors de ladite « Commission mixte paritaire ». Patronnant aujourd’hui comme Président désigné au sommet d’une Ve République installée par une fausse Constitution qui a enterrée en toute illégalité et illégitimité celle de la IVe République qu’il prétendait à l’époque « sauver » par ces fameux « Accords de la Commission mixte paritaire », sa trahison démasque tout. En effet, elle démontre mieux que tout aujourd’hui comme hier, qu’ensemble avec tous les traîtres le suivant depuis lors dans cette voie, ce ne sont nullement les aspirations du peuple togolais qui sont en jeu mais bien plutôt les intérêts d’une minorité de profiteurs, acteurs politiques cupides à la quête de juteux postes et responsabilités au sein des institutions de la dynastie dictatoriale des EYADEMA-GNASSINGBE.

C’est cette même trahison du peuple togolais qui, hier, a été consommée lorsque la mort en France de Tavio n’a été annoncée que le mercredi 29 juillet 1992, une fois le peuple togolais mis devant le fait accompli des « Accords de la Commission mixte paritaire » dûment signés.

Depuis lors, bien que les résultats sommaires et laconiques de l’autopsie transmis à la famille n’aient pas permis de lever certaines interrogations entourant son assassinat, et que la plainte déposée par la famille auprès des tribunaux togolais soit également restée sans suite jusqu’à ce jour, une totale impunité n’a cessé d’être garantie à ses assassins connus dont l’un, KAREWE Kossi, a quitté le monde de vivants sans rendre compte de son crime. Un crime par lequel le sang de Tavio, versé sur la terre de nos aïeux, a rajouté au symbole qu’il était déjà pour les jeunes et anciennes générations ces autres rangs de martyr et « enfant chéri » que les peuples confèrent aux personnages dans lesquels ils se reconnaissent.

Quant au commanditaire de ce crime dont les exécutants, eux, sont connus pour les principaux d’entre eux, il n’y a jamais eu de doute pour quiconque que c’est bien de Gnassingbé EYADEMA qu’il s’agit surtout lorsqu’est posée l’élémentaire question qui surgit face à de tels actes criminels : à qui profite le crime ?

Car, principal bénéficiaire des conclusions traîtresses de la Commission mixte paritaire où les principaux acquis arrachés de haute lutte par le peuple togolais depuis le soulèvement populaire du 5 octobre 1990 ont été bradés au profit de sordides intérêts nationaux et internationaux qui plombent le peuple togolais depuis maintenant 35 ans, c’est bien à lui qu’a profité, au titre principal qui en fait le commanditaire, le crime commis sur Tavio ! Sans oublier que, depuis 33 ans, cet assassinat, qui demeure une pièce maîtresse des sauvetage et maintien d’une dynastie dictatoriale soixantenaire infâme, continue d’assurer la préservation de ces obscurs intérêts nationaux et internationaux, personnels et collectifs, qui n’en finissent pas d’enfoncer dans l’abime le Togo.

Mais, au nom de la mémoire de Tavio, elle va tomber, cette dynastie dictatoriale soixantenaire des Gnassingbé-EYADEMA !

Honneur et gloire à l’inoubliable martyr et enfant chéri du peuple togolais, Tavio Ayawo Tobias AMORIN !


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