SYLVANUS FOREVER !

15 septembre – 15 octobre 2025 :
Mois des martyrs et prisonniers politiques du Togo
Père de l’indépendance et de la nation togolaise,
Premier président démocratiquement élu de la République togolaise,
Assassiné au petit matin du 13 janvier 1963 par Etienne EYADEMA

Le contexte :

Après avoir été colonisé par l’Allemagne (1884 – 1914) puis par la France depuis la défaite allemande à la Première Guerre mondiale, le Togo accède à la souveraineté internationale sous la direction de Sylvanus OLYMPIO qui proclame son indépendance le 27 avril 1960.

Deux années auparavant, le peuple togolais s’est prononcé pour l’indépendance immédiate en élisant une majorité de députés nationalistes au Parlement aux élections du 27 avril 1958 organisées sous la supervision d’une Mission que l’ONU a dépêchée au Togo pour empêcher les fraudes, les tracasseries et les mesures répressives systématiquement mises en œuvre par le pouvoir colonial français depuis 1951 contre la transparence des scrutins.

Le 9 avril 1961, des élections générales à une triple consultation : constitutionnelle, législative et présidentielle, majoritairement remportées par le Comité de l’unité togolaise, dotent le pays des nouvelles institutions de la Ière République du Togo et.

Le 30 janvier 1962, une crise s’ouvre au sommet de l’Etat qui prend la décision de dissoudre le parti Juvento (Justice, Union, Vigilance, Education, Nationalisme, Ténacité, Optimisme), membre de la coalition gouvernementale, après l’annonce de la découverte d’un complot suite à l’apparition de divergences entre ce parti et le Comité de l’unité togolaise (CUT). Elle conduit au départ de ses membres du gouvernement, pendant que surviennent des arrestations.

Début janvier 1963, alors que le gouvernement dirigé par Sylvanus Olympio s’apprête à franchir un nouveau pas dans l’affirmation de la souveraineté nationale par la création d’une monnaie nationale qui dégagerait le Togo de la zone franc donc de la tutelle économique française, la situation du pays bascule brutalement avec son assassinat.

Le Premier martyr du Togo indépendant

Sylvanus Epiphanio Elpidio Kwami OLYMPIO, premier président démocratiquement élu du Togo à l’élection présidentielle du 9 avril 1961, père de 5 enfants, lâchement assassiné par Etienne EYADEMA GNASSINGBE, le 13 janvier 1963.

Aux aurores du 13 janvier 1963, comme un coup de tonnerre dans un ciel serein, l’information suivante tombe sur les téléscripteurs du monde entier : « Coup d’Etat au Togo. Le président de la République Sylvanus OLYMPIO assassiné ».

Premier président démocratiquement élu du Togo, Sylvanus E. E. K. OLYMPIO, venait d’être lâchement assassiné par Etienne EYADEMA GNASSINGBE lors de ce premier coup d’Etat sanglant de l’Afrique indépendante, fomenté par les réseaux du tristement célèbre Jacques FOCCART, le secrétaire d’Etat aux Affaires Africaines et Malgaches du gouvernement français alors dirigé par Charles de GAULLE.

En effet, chose tout à fait étonnante qui démasque un complot organisé du plus haut sommet de l’Etat français : à 6 H du matin, ce 13 janvier 1963, France Inter, la radio de l’Etat français annonce la nouvelle de l’assassinat d’OLYMPIO alors qu’il n’a même pas encore été retrouvé par le commando putschiste envoyé à ses trousses et qui ne va le capturer que vers 7H du matin avant qu’EYADEMA ne l’assassine !

OLYMPIO qui, une première fois, a réussi à échapper au commando putschiste qui a mitraillé sa maison dans la nuit, a réussi à se réfugier à l’Ambassade des Etats-Unis d’Amérique, cachette où l’Ambassadeur des Etats-Unis, Léon POULLADA, le retrouve et en informe l’Ambassadeur de France, Louis MAZOYER. Ce dernier en informe à son tour le commandant MAÎTRIER, l’officier français commandant la gendarmerie nationale togolaise, et à qui l’organisation du putsch a été confiée. Celui-ci réussit préalablement à manipuler et à s’assurer de la complicité des demi-soldes revenues au Togo après leur démobilisation de l’armée française à la fin de la guerre d’Algérie. MAÎTRIER envoie alors le commando de demi-soldes togolais capturer OLYMPIO dans l’enceinte-même de l’Ambassade des Etats-Unis d’Amérique dont ils escaladent le mur de clôture, en violation flagrante de la règle d’extraterritorialité protégeant toutes les représentations diplomatiques.

Une fois Sylvanus OLYMPIO capturé et sorti des locaux de l’Ambassade des Etats-Unis, Etienne EYADEMA GNASSINGBE, qui fait partie du commando de demi-soldes, l’abat à bout portant, par des balles tirées sur lui en pleine poitrine et au bas-ventre avant de lui sectionner, au couteau, les veines des poignets. Puis, avec la baïonnette de l’arme, il lui taillade la cuisse gauche tout en expliquant fièrement à ses camarades : « C’est comme ça que je faisais en Algérie pour m’assurer que mes victimes étaient bien mortes ».

OLYMPIO agonise longuement ainsi au sol en se vidant de son sang, dans d’atroces souffrances.

Dans une interview aux journalistes de la presse étrangère : Chauvel du journal français Le Figaro et Pendergast du magazine américain Time-Life, Etienne EYADEMA GNASSINGBE a publiquement revendiqué l’assassinat de Sylvanus OLYMPIO qu’il leur a raconté, sans honte ni remords, dans les termes suivants :

« A l’aube, nous sommes allés vers le parking de l’Ambassade américaine. L’homme, tout sali, était blotti sous le volant d’une Plymouth de l’Ambassade, garée là. On lui a dit : « Nous t’avons repéré, sors de là ! » Olympio a répliqué : « D’accord, j’arrive. Où m’emmenez-vous ? » « Au camp militaire », avons-nous répondu. Il est descendu de la voiture et a marché vers le portail de l’Ambassade. Là, il s’est arrêté (réalisant sans doute que, s’il continuait, il perdait toute protection diplomatique), et nous a dit qu’il ne voulait pas aller plus loin. Je décidai : c’est un homme important, et il pourrait y avoir des manifestations de foule s’il restait ici. Aussi, je l’ai descendu. »

Récupéré par le révérend père Jean GBIKPI, Christophe DA GLORIA et la famille OLYMPIO, le corps de Sylvanus OLYMPIO a pu échapper à la profanation et à la disparition qu’on a fait subir à celui d’Emery LUMUMBA du Congo en le faisant dissoudre dans un bac d’acide. Acheminé au Bénin, il est inhumé au carré des Afro-brésiliens du cimetière catholique d’Agoué-Adigo.

Premier coup d’Etat sanglant du genre dans toute l’Afrique indépendante, les autorités françaises en portent l’entière responsabilité pour l’avoir commandité ainsi que les autorités américaines pour s’y être associées à travers le rôle joué par Léon POULLADA, leur représentant au Togo qui, par une naïveté supposée, a livré Sylvanus OLYMPIO à l’Ambassadeur de France, Louis MAZOYER.

En forçant les régimes africains placés sous sa domination à avaliser ce putsch sanglant, les autorités françaises ont inauguré une ère d’impunité à l’ombre de laquelle la banalisation de l’assassinat politique a été érigée en méthode de gouvernement non seulement au Togo mais sur tout le continent africain où il s’est généralisé par la suite.


Cliquez ici pour réagir à cette fiche de martyr(s)
Réactions au Mois des martyrs et des prisonniers politiques